Puisque j’ai décidé de parler de « cons », encore faut-il que je définisse le terme. Le mot « con » est un mot polysémique et un substantif trivial qui désigne tout à la fois la vulve et une personne stupide. La première définition ne nous intéressera pas ici et la seconde n’est guère utilisable, à cause de son caractère particulièrement relatif. Généralement est désigné comme « con » une personne qui n’est pas de mon avis ou qui agit d’une manière avec laquelle je suis en désaccord et que je réprouve particulièrement. Nous voyons bien ici que cette définition n’est pas utilisable parce que tout à fait relative : à un moment où un autre, chacun de nous peut être le « con » de quelqu’un d’autre.

À titre anecdotique, j’ai à une certaine époque de ma vie fait partie d’une secte qui s’appelait ainsi : « Mort aux cons » dont l’objectif était grâce à la « chasse aux cons », d’éliminer progressivement (mais le plus rapidement possible) tous les cons de la terre. Inutile de dire que cette secte avait de l’ouvrage. Mais je l’ai finalement quittée, parce que je me suis aperçu que les membres les plus importants finissaient par se faire éliminer pour connerie. J’en suis sorti juste à temps, menacé, moi aussi, d’être éliminé pour ce motif.
Je l’ai échappé belle ! Mais je remarque que comme le phénix, la secte semble ne s’être jamais totalement éteinte et tente de renaître de ses cendres et de retrouver une activité manifeste.

Malgré le problème de définition évoqué plus haut, je vais pourtant m’intéresser à deux catégories antagonistes de « cons » : les « vieux cons » et les « jeunes cons » et commencer par tenter de les définir, malgré leur caractère également relatif.

Un « vieux con » est généralement une personne âgée (50 ans et plus) vue par un jeune (30 ans ou moins) et qui développe aux yeux de ce dernier un immobilisme coupable et des idées ringardes et dépassées.
Un « jeune con » est généralement une personne jeune (30 ans ou moins) ainsi désignée par une personne d’un certain âge (50 ans et plus) parce qu’elle tient des propos ou agit d’une manière que réprouve l’ancien.

Ici, rien de nouveau, une simple question de relationnel entre générations.

Si j’évoque tout cela, c’est parce qu’il se passe en moment dans le monde ostéopathique, particulièrement sur les réseaux sociaux des choses qui évoquent irrésistiblement « une chasse aux cons » dont font les frais les tenants d’une ostéopathie plus orientée vers la philosophie voire (quelle honte !) la spiritualité. Leurs opposants appartiennent à la secte scientiste, ardents défenseurs d’une « ostéopathie scientifique ». Il se trouve que je fais partie des tenants d’une ostéopathie philosophique. Vu mon âge, je fais en même temps partie de la catégorie des « vieux con ». Pour ces deux raisons, je suis choqué par les méthodes utilisées par les tenants de la secte scientiste pour défendre leurs idées et surtout pour dénigrer souvent avec véhémence, celles de ceux qui ne pensent pas comme eux.

Tous les moyens sont bons, dénigrements souvent non fondés, parfois injurieux, souvent anonymes (il est tellement facile de cracher son venin et sa haine en étant certain de pas être reconnu et donc pas inquiété). Le système reprend une mode initiée dans les années 1990 par les Guignols de l’info sur Canal+ qui caricaturaient et faisaient dire n’importe quoi à toutes sortes de personnalités, politiques ou autres. Ce genre de comportement, même s’il n’est pas toujours infondé, conduit à tout tourner en dérision, à détruire toute tentative d’existence ou de développement d’idées. C’est particulièrement destructeur.

Parmi ces Zorro du scientisme, tous ne sont pas anonymes, ce qui ne les empêche pas d’être véhéments malgré, pour beaucoup, une méconnaissance crasse de l’histoire de la création de l’ostéopathie (par un certain A. T. Still, si vous n’avez jamais entendu parler de lui) et de sa philosophie et une inexpérience évidente de la vie et de la pratique ostéopathique. Sans compter certains comportements manifestement psychiatriques.

Et cela évoque pour moi une autre définition, donnée dans les années 1960 (encore la préhistoire…) par Michel Audiard, un dialoguiste de cinéma très connu dans le film Les Tontons flingueurs : « les cons osent tout. C’est même à ça qu’on les reconnaît »

Et c’est bien ce qui se passe avec les réseaux sociaux : grâce au relatif anonymat, n’importe qui peut faire et dire n’importe quoi, totalement impunément (c’est encore le « vieux con » qui parle).

Une des choses qui me choque le plus dans ces échanges, c’est l’irrespect par rapport aux anciens (encore le « vieux con » qui parle !) Je ne parle pas des grands anciens (Still, Sutherland, Becker, Littlejohn, etc., pour la plupart inconnus des jeunes ostéopathes), mais des anciens – dont je fais partie – qui ont construit, souvent dans la difficulté et le risque, l’ostéopathie d’aujourd’hui et qui ont permis aux plus jeunes (Dieu merci pas forcément « cons ») d’y accéder facilement et de la pratiquer sans risque.
De plus, indépendamment de cela, le respect d’autrui me semble faire partie intégrante des valeurs essentielles de l’ostéopathie – en fait, c’est tout simplement une valeur humaine fondamentale. Je me questionne donc vraiment les qualités humaines de ces ostéopathes.

Une autre chose me choque de la part des tenants de la secte scientiste : c’est leur intransigeance et l’ignorance qu’elle manifeste des fondamentaux de l’ostéopathie. Vouloir une ostéopathie totalement scientifique (avec les critères de ce qui est aujourd’hui considéré comme scientifique, c’est-à-dire matérialiste), c’est considérer l’humain comme un simple objet matériel auquel on pourra appliquer les sciences dites « dures ».

Mais face à ces sciences « dures » existent des sciences dites « humaines » qui voient en l’humain des dimensions autres, notamment mentales et spirituelles. Et l’ostéopathie (que je prétends connaître un minimum) est à l’évidence une science humaine. Still l’indiquait déjà à son époque :

et après toutes ces explications, nous devons décider que l’homme, lorsqu’il est complet, est trinitaire En premier, le corps matériel, en second, l'être spirituel, en troisième, un être de pensée de loin supérieur à tous les mouvements vitaux et aux formes matérielles, dont le devoir est de diriger sagement ce grand mécanisme de vie (Philosophie de l’ostéopathie, p. 49).

Il est donc non seulement tout à fait normal, mais particulièrement souhaitable que des ostéopathes aillent plus loin dans leurs études et leur activité que la considération du seul corps matériel, et tentent d’explorer les domaines plus vastes de l’esprit et de l’être, même si, dans tout ce qu’ils proposent, tout n’est pas « vérifiable » avec des chiffres. En revanche, l'aide apportée aux patients, même si elle n'est pas quantifiable, est bien réelle. Pourquoi viendraient-ils consulter des praticiens qui ne leur apportent aucun bien-être ?

Cela ne rejette pas les considérations scientifiques, mais à l’évidence, il faut les laisser à leur place et ne pas en faire un dogme.

D’ailleurs, à ce propos, et pour en terminer un des principaux pourfendeurs des approches autres que scientifiques se veut également pourfendeur de tout ce qui est dérive sectaire. Sans même discerner que son comportement et son rejet de toute autre approche que la sienne est par nature sectaire. Il est en fait chef de secte !

Un dernier conseil, peut-être pour notre ami « connophobe ». Même si elle n'est pas encore référencée dans le DSM-5, c'est une maladie psychiatrique. Je lui conseille vraiment de se faire soigner – rapidement –, avant que ses débordéments ne détériorent la situation au point qu'il risque bien d'être la principale victime.

Pour terminer, permettez-moi de m’amuser, moi aussi aux dépens de la secte scientiste avec ce dessin déjà ancien, qui résume assez bien la situation.

Ostéopathe cherchant à faire entrer l'ostéopathie dans un cadre strictement scientifique

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