Livre : Approche tissulaire, livre 1 - Soif de reconnaissance

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Soif de reconnaissance
Une des raisons majeures qui nous conduit à rompre notre intégrité vient de notre soif de reconnaissance, sociale, médicale, scientifique, et autre, qui nous pousse à agir en privilégiant d’autres critères que nos fondements, à choisir et utiliser d’autres fulcrums que les nôtres : ceux qui centrent notre cohérence. Pourtant, si nous examinons la manière dont ont agi ces Anciens, nous nous apercevons que leur comportement fut tout autre : ils ont osé affirmer ce qu’ils étaient et ce qu’ils pensaient, sans jamais accepter de compromis sur ce qu’ils estimaient essentiel. Est-il une autre manière d’exister que tel que l’on est vraiment ? Cela s’appelle intégrité, et notez bien que je n’ai pas écrit intégrisme.

Or, nous agissons bien différemment. Alors que nous désirons vivre pleinement notre vie d’ostéopathe, nous nous efforçons de ne pas prêter le flanc à la critique ce qui ne peut que nous inhiber totalement et générer de graves conflits intérieurs. À ce titre, la situation des ostéopathes en France me fait depuis très longtemps penser à celle de l’adolescent, tiraillé entre le besoin d’être reconnu par ses pairs (son père ?), et celui de vivre sa vie comme il l’entend. Face à cette difficulté, il adopte souvent des attitudes extrêmes de révolte ou de soumission. Aucune de ces attitudes ne peut lui permettre d’exister réellement, parce qu’aucune n’est juste. Il s’agit d’attitudes réactives. Ce conflit ne se résout complètement que lorsqu’il acquiert une maturité suffisante pour comprendre qu’il existe réellement, indépendamment de la reconnaissance des autres et qu’il se doit d’assumer seul cet état d’existence en vivant la vie qu’il veut vivre, pleinement. Il est devenu adulte. Hélas, combien d’humains parviennent à l’état adulte ?

Cette situation m’a longtemps retenu d’exprimer pleinement ce que je vis : alors que les mouvements ostéopathiques tentent d’obtenir cette reconnaissance en privilégiant résolument l’aspect scientifique de leur pratique, ai-je le droit de présenter une approche qui à l’évidence n’est pas scientifique, mais philosophique, voire spirituelle ? Ce qui m’a finalement fait prendre position, c’est cette question : si Still ou Sutherland avaient été des scientifiques selon les standards aujourd’hui en vigueur, auraient-ils développé l’ostéopathie ? Je n’en suis pas certain du tout. Par rapport aux standards ayant cours aujourd’hui, ils ont vécu le monde à l’envers : ils ont expérimenté directement la vie, avant de créer des modèles leur permettant d’expliquer ce qu’ils ressentaient ou observaient, et de les expérimenter. La manière dont ils ont procédé est aujourd’hui difficilement admise par le monde universitaire et scientifique : ils sont partis de l’expérience, ne recherchant le savoir que pour expliquer ou justifier leurs découvertes, alors que le scientifique et l’universitaire d’aujourd’hui privilégient le cheminement inverse : d’abord la connaissance puis l’expérimentation.