Philosophie d’abord
Dans cet ouvrage, Still ne nous parle que de philosophie [6], c’est-à-dire qu’il nous indique quel état d’esprit adopter, comment évaluer l’organisme en partant du normal afin de comprendre l’anormal. Il s’attache à un modèle général et simple, applicable pour observer et traiter efficacement le patient. Il nous montre sans cesse dans quel esprit doit observer et travailler l’ostéopathe. Il ne fournit aucune technique. Il en fournira d’ailleurs très peu dans ses ouvrages. Il semble que cela ait été de sa part délibéré : « Je désire exprimer clairement qu’il existe de nombreux moyens pour ajuster les os. Et lorsqu’un praticien n’utilise pas la même méthode qu’un autre, cela ne démontre aucunement de l’ignorance criminelle de la part de l’un ou de l’autre, mais simplement deux moyens différents pour obtenir le même résultat... Chaque praticien devrait utiliser son jugement personnel et choisir sa propre méthode pour ajuster tous les os du corps. Le problème n’est pas d’imiter ce que font avec succès quelques praticiens, mais de ramener un os de l’anormal au normal. » (Still, 2001, 44) [7].
De multiples sources
Le modèle ostéopathique s’est élaboré lentement, Still désirant accompagner son savoir faire d’un savoir penser.
« Il naquit fils d’Abram Still, un prêcheur méthodiste itinérant de la frontière, de telle sorte que la doctrine méthodiste du perfectionnisme imprégna sa philosophie, tout comme elle imprégna d’une manière ou d’une autre l’ensemble de la pensée et de l’activité américaine du dix-neuvième siècle. […] Quelques philosophes étendirent le concept de perfectionnisme à ce qu’ils percevaient comme l’étape logique ultérieure et demandèrent : si Dieu est parfait, comment toute chose par Lui créée, y compris le genre humain, pourrait-elle être imparfaite ? Telle fut la position de Still. »
Expérimentateur sans limites, il est allé chercher dans tous les domaines s’offrant à sa curiosité : « L’univers de Still ne fut plus jamais le même après qu’il se soit accordé à la pensée des transcendantalistes,[8] des universalistes,[9] des spiritualistes,[10] des mesméristes [11] et des phrénologistes,[12] chacun d’eux étant le fer de lance de mouvements fondés sur un monde centré sur l’humain fonctionnant selon des lois naturelles. Leurs idées firent vibrer toute la pensée américaine du dix neuvième siècle et ouvrirent la voie à l’acceptation de la théorie de l’évolution. Bien que l’ostéopathie soit née à la frontière,[13] Still a bénéficié du flux incessant d’idées du dix neuvième siècle, formulant sa science à partir de la phrénologie, du mesmérisme ou du magnétisme, du reboutement, du spiritualisme, du perfectionnisme, de la mécanique, et des concepts évolutionnistes. Comme la vie de Still peut être mieux comprise en le replaçant dans le monde de son temps, la première partie de ce livre est consacrée à l’environnement familial de Still. La seconde partie s’intéresse à l’histoire personnelle de Still, pour montrer aussi précisément que possible les choix qui se présentèrent à lui à cette époque. » (Trowbridge, 1998, 15-17) (Trowbridge, 1999, 15-16).